Une idée tout droit venue du Japon
Besoin d’un petit ami cultivé pour impressionner votre entourage ? D’un fils parfait pour forcer l’admiration de vos clients ? D’un répétiteur pour vous préparer à une dispute conjugale ? Louez Matthias, un maître dans sa profession, excellant chaque jour à se faire passer pour une personne différente ! Mais quand Matthias doit être lui-même, le véritable défi commence…

“Les gens de ma génération ont des rapports de plus en plus artificiels, et notre tendance à l’autopromotion, notre vanité et notre désir de reconnaissance peuvent nous pousser à jouer un rôle dans notre vie quotidienne”, affirme le cinéaste Bernhard Wenger. Peacock, son premier long métrage, est une comédie tragique aussi drôle qu’absurde, qui explore avec finesse et un humour pince-sans-rire un phénomène fascinant et méconnu tout droit venu du Japon : la location de personnes pour jouer des rôles sociaux, familiaux ou professionnels.
Pour ce faire, le cinéaste se rend au pays du soleil levant en 2018 et y rencontre des employés de ces agences spécialisées. Devenues très populaires depuis une vingtaine d’années, elles avaient pour vocation d’aider les personnes confrontées à l’isolement et à la solitude. Aujourd’hui, on peut y louer une personne pour améliorer son image ou manipuler quelqu’un. C’est dans ce cadre aussi fascinant que bizarre que l’idée du film est née.

Une performance d’une grande finesse
Albrecht Schuch (Le Joueur d'échecs, À l'Ouest, rien de nouveau, Benni) incarne Matthias avec une maîtrise impressionnante, capturant toute la complexité d’un personnage en perte d’identité. Son travail l’obligeant à jouer un rôle permanent, Matthias ne sait plus qui il est ou ce qu’il aime, même dans son quotidien.
“Une des clés dans la création ou le décryptage de Matthias a été le long-métrage Heureux comme Lazzaro d’Alice Rohrwacher, explique l’acteur. Durant une de nos conversations avec Bernhard [Wenger], j’ai repensé au personnage principal de ce film. Sa complète ouverture au monde, sa curiosité et son absence de jugement m’ont aidé à considérer le manque de personnalité de Matthias avec davantage de légèreté et de bienveillance.”

Habitué à des rôles de héros, Albrecht Schuch a réussi, en collaboration avec le réalisateur, à creuser cette figure d’homme “page blanche”, où les émotions semblent anesthésiées par la nécessité de la performance.
Un humour visuel et une ambiance unique
Bernhard Wenger mise sur un humour subtil, visuel, inspiré par des maîtres comme Jacques Tati, mais aussi par la noirceur et la liberté du cinéma scandinave ou des comédies britanniques grinçantes. Peacock mélange tragédie et comédie avec une fluidité remarquable, naviguant entre satire sociale, thriller psychologique et drame intime, dans la même lignée que Sans Filtre de Ruben Östlund, La Favorite de Yorgos Lanthimos ou encore Toni Erdmann de Maren Ade.

Le long-métrage installe une atmosphère insolite où les situations absurdes du quotidien prennent une dimension à la fois comique et profondément humaine. À travers Matthias, il dresse aussi un regard sur notre époque, où le jeu des apparences gouverne de plus en plus nos relations.
Peacock, comédie grinçante et réjouissante, à découvrir en salle dès le 18 juin.